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Chaque année, l’équipe Formule électrique de McGill (MFE) conçoit et produit une voiture électrique de course. Des compétitions interuniversité ont lieu dans plus de 12 endroits dans le monde. Chacune de ces compétitions comprend des épreuves statiques et dynamiques permettant d’attribuer des points en fonction de la conception et des performances des voitures.Les épreuves statiques sont jugées par des ingénieurs issus du sport automobile ou de l’industrie automobile, et les épreuves dynamiques permettent quant à elles de comparer les réelles performances sur la piste.
La course d’endurance est la clé pour remporter le concours général, car elle compte pour 275 points sur les 1 000 points au total. Les véhicules doivent effectuer un certain nombre de tours sur un circuit préétabli le plus rapidement possible. Cette course d’endurance est le test réel de la fiabilité des véhicules; un système de refroidissement efficace fait partie intégrante d’un design fiable. En effet, toutes composantes électriques ou électroniques doivent être maintenues dans une certaine plage de température pour un rendement optimal. La conception de cette année utilise un système de refroidissement à eau pour les moteurs et leur onduleur respectif, et un système de refroidissement à air pour le bloc-batterie.
Figure 1 : Rendu CAO de la voiture de la MFE, de son système de refroidissement et de son bloc-batterie
La rapide évolution vers l’électrification des transports amène son lot de défis et les problèmes rencontrés par la MFE sont communs à ceux auxquels les entreprises du secteur du transport sont confrontées à travers le monde si elles veulent relever le défi de l’électricité.
Dans cette série d’articles, nous démontrerons comment utiliser des logiciels de simulation avancés (Simcenter Amesim et Star CCM+) pour valider et développer la conception d’un système de refroidissement d’un véhicule électrique.
Ce premier article explique comment Simcenter Amesim peut être utilisé rapidement dans le processus de design pour évaluer la performance du système de refroidissement et la capacité du bloc-batterie.
Objectif : Valider le transfert de chaleur et les températures avec Amesim
La simulation Simcenter Amesim a été créée pour :
- Valider l’atteinte des exigences de refroidissement par la conception actuelle.
- Évaluer le transfert et la génération de chaleur transitoire en situation de course.
Les exigences de refroidissement sont établies par les fabricants de moteurs, d’onduleurs et de batteries, et sont listées dans le tableau ci-dessous.
Tableau 1 : Exigences de refroidissement
Plaque froide de l’onduleur | Moteur électrique | Cellules de la batterie |
Température de surface de la plaque froide < 40 ⁰C | Δ T de la chemise d’eau < 5 ⁰C | Température de charge < 45 ⁰C |
Débit du liquide ≈ 10 L/min | Débit du liquide > 2 L/min | Température de décharge < 60 ⁰C |
Température à l’entrée < 30 ⁰C | Température à l’entrée < 40 ⁰C |
La simulation se veut simple et le but est d’avoir une base solide pour pouvoir l’améliorer dans le futur.
Ce premier modèle repose entièrement sur la conversion de paramètres géométriques en données macro.Le modèle est le résultat d’un effort collaboratif entre les membres de l’équipe de dynamique du véhicule, celle de la batterie et d’un membre de l’équipe d’aérodynamique et de refroidissement (stagiaire de Maya HTT).
Vue d’ensemble du modèle : Simulation de course, circuit de refroidissement liquide, modèle de bloc-batterie
Le modèle peut être séparé en trois parties :
- Traitement des données de la simulation de course
- Circuit de refroidissement liquide
- Modèle de la batterie
Le véhicule a deux systèmes de refroidissement identiques, mais seul l’un d’eux est simulé ici.
Figure 2 : Modèle Simcenter Amesim avec ses trois parties
Traitement des données de la simulation de course
L’encadré supérieur définit les conditions de fonctionnement du système. Les données de simulation d’un circuit type de course d’endurance sont traitées en se basant sur le diagramme de performance pour calculer les transferts de chaleur des onduleurs et des moteurs. La consommation d’énergie du bloc-batterie nécessaire pour obtenir la puissance souhaitée pour les moteurs est aussi calculée ici. Le système est construit de telle manière que les données de simulation de tour puissent être modifiées en quelques secondes afin de tester différents circuits.
Modèle de la batterie
L’encadré en bas en gauche simule le déchargement de la batterie durant la course. Une source d’énergie est utilisée pour calculer le courant et le potentiel de la batterie. Une masse thermique est utilisée avec un bloc de transfert thermique pour obtenir la température moyenne de la batterie.
Figure 3 : Modèle de bloc-batterie
Le modèle de bloc-batterie a été créé avec l’outil d’importation de la fiche technique de la batterie et l’architecture du bloc. L’outil d’importation de la fiche technique de la batterie est une fonction intégrée de Simcenter Amesim permettant d’importer directement les courbes de performance des cellules de la batterie à partir d’un PDF ou d’une image.
Figure 4 : Importation des données des cellules de la batterie et ses trois volets : acquisition d’image, calibration du modèle et statistiques
Le bloc-batterie de la voiture de course composé de deux ensembles parallèles de 144 cellules de 6 Ah montées en série. Le voltage à plein rendement est d’environ 600 V. Cette partie du modèle permet donc d’obtenir une estimation du transfert et de la génération de chaleur par la batterie, et fournit une validation précise par rapport à la capacité du bloc-batterie et aux limites de consommation d’énergie imposées.
Circuit de refroidissement liquide
La partie principale de la simulation porte sur le système de refroidissement liquide. Il comporte une plaque froide refroidissant deux onduleurs, deux chemises d’eau de moteur, un radiateur, une chambre hydraulique et une pompe.
Figure 5 : Système de refroidissement liquide
Le modèle se base sur l’hypothèse que toute la chaleur est rejetée directement dans la masse thermique des composants et des dispositifs électriques, pour être ensuite absorbée par le liquide de refroidissement. Ce transfert de chaleur est simulé à l’intérieur de l’encadré rouge. Le premier bloc convertit le signal en chaleur, le second est un bloc de masse thermique et le troisième bloc simule le transfert de chaleur vers le liquide. Le bloc de masse thermique permet d’introduire un délai entre le signal et l’absorption de la chaleur par le liquide. Il permet également de mesurer la température moyenne des composants au fur et à mesure de la course. Les blocs représentés par un tuyau utilisent les dimensions et autres caractéristiques géométriques des composants de refroidissement pour calculer le taux de transfert de chaleur.
Figure 6 : Plaque froide de l’onduleur et chemise d’eau du moteur
La diminution de la pression de l’entrée à la sortie des composantes est également calculée à partir des dimensions. Le débit du liquide refroidissant est ensuite calculé par le logiciel en fonction de la perte de charge totale et de la courbe de performance de la pompe donnée.
Finalement, le modèle de radiateur a été représenté par un demi-échangeur de chaleur avec un transfert de chaleur contrôlé pour maintenir la température à la sortie à 30 ⁰C. Ceci correspond à la température à l’entrée de la plaque froide exigée par le fabricant et a été fait dans un but de simplification du modèle. La modélisation d’échangeur de chaleur peut s’avérer complexe et une des façons d’y arriver dans Amesim est d’utiliser deux demi-échangeurs de chaleur avec un calculateur de transfert de chaleur basé sur l’efficacité NTU.
Figures 6 et 7 : Géométrie du radiateur et son équivalent Simcenter Amesim
Résultats : Validation de la conception et améliorations possibles
La simulation est d’une durée de 15 tours ou jusqu’au moment où la charge de la batterie descend en dessous de 10 %.
Simcenter Amesim permet de visualiser et analyser une panoplie de variables pour chaque bloc de la simulation. Pour cette simulation, les transferts de chaleur, la température du liquide refroidissant, la charge du bloc-batterie et la température moyenne des composantes ont été représentés sur des graphiques.
Les résultats présentés dans un premier temps sont ceux de la simulation avec l’échangeur de chaleur contrôlé. Les résultats de la simulation avec la représentation réaliste du radiateur se trouvent à la fin de la section.
Bloc-batterie
La simulation de course a été réalisée avec un maximum de 40 kW selon la puissance que les moteurs peuvent obtenir du bloc-batterie. Il a rapidement été déterminé que la capacité de la batterie était suffisante pour terminer la course d’endurance. Le refroidissement de la batterie permet de maintenir la température moyenne sous les 36 ⁰C avec des pertes associés à la résistance ohmique entre 0 et 400 W, pertes qui augmentent drastiquement quand le bloc-batterie approche 10 % de charge.
Figures 8 et 9 : Transfert de chaleur et température (gauche) et capacité et voltage (droite)
Le niveau de recharge et le voltage de la batterie ont également été enregistrés. La conception actuelle indique que le bloc-batterie est en mesure de répondre aux demandes de la course d’endurance.
Circuit de refroidissement liquide
La première exigence à valider pour le circuit de refroidissement est que la pompe peut atteindre le débit massique cible de 10 L/min. Ceci est rapidement fait et la prochaine étape est de vérifier la température du liquide de refroidissement.
Figure 10 : Température du liquide de refroidissement à différents points
L’augmentation de la température du liquide à travers chaque composant de refroidissement est en deçà de la limite du fabricant. Ceci est également validé avec un rapide calcul à la main. Un graphique similaire a été produit pour obtenir la température moyenne de la plaque froide de l’onduleur et les moteurs.
Figure 11 : Température des composants refroidis
L’exigence d’une température maximale de la plaque froide de 40 ⁰C ne peut pas être validée selon la discrétisation actuelle du domaine, mais avec une température moyenne de 31 ⁰C, le système fonctionne dans la bonne plage de température.
Finalement, il est intéressant de quantifier le transfert de chaleur moyen de chaque composant de refroidissement du départ jusqu’à ce qu’un état d’équilibre soit atteint. Par la suite, le contrôle du transfert de chaleur que le radiateur doit atteindre pour maintenir la température de sortie à 30⁰C peut donner une bonne estimation de la capacité du radiateur et du type de performance qu’il doit atteindre.
Figure 12 : Transferts de chaleur des différents composants du système de refroidissement
La plaque froide dissipe en moyenne 200 W et les chemises d’eau du moteur 800 W chacune au stade initial. Le radiateur doit donc rejeter environ 1800 W à l’état d’équilibre. La sélection d’un radiateur et d’un ventilateur peut donc être effectuée en se basant sur ces données cibles et la différence entre la température du liquide à l’entrée du radiateur et celle de l’air ambiant.
Une recherche rapide a montré que les radiateurs ne semblaient pas suffisamment performants. L’exigence de maintenir la température à l’entrée de la plaque froide à 30 ⁰C est problématique et pourrait s’avérer impossible à atteindre dans des conditions chaudes. Le tout a été testé avec le bloc d’échangeur de chaleur complet présenté à la figure 7.
Les résultats indiquent que les radiateurs actuels ont besoin d’un gradient de température élevé entre l’air et le liquide de refroidissement avant d’atteindre un état stable. Les températures se stabilisent donc à de plus grandes valeurs.
Figure 13 : Transferts de chaleur et températures à l’entrée et sortie du radiateur
Quoique ces résultats ne soient pas ceux souhaités, trouver ce genre de problème est le but exact de cette simulation. La simulation permet maintenant de tester différentes solutions : augmenter le débit massique de refroidissement et de l’air, changer le radiateur ou séparer les onduleurs et moteurs sur deux circuits de refroidissement distincts.
Prochaines étapes
Le but de ce modèle était de vérifier que le système actuel fonctionnait correctement. L’exactitude était une considération, mais elle pourrait être améliorée.
Le prochain article de cette série portera donc sur l’utilisation de la dynamique numérique des fluides (CFD) avec STAR-CCM+ pour coupler les données de CFD avec celles du modèle Simcenter Amesim et améliorer l’exactitude du modèle.
Conclusion
La simulation a permis de pleinement caractériser la performance du système de refroidissement de la MFE. Il a également permis de valider la capacité du bloc-batterie et le choix des cellules dans le contexte de la course d’endurance.
L’utilisation de Simcenter Amesim a rendu la tâche efficace et rapide – une amélioration considérable par rapport aux grilles Excel et au modèle Simulink beaucoup moins intuitif. La simulation est maintenant facile à modifier pour évaluer d’autres conceptions.
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Frédéric Vallée, stagiaire en ingénierie, ingénierie mécanique, Université McGill